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Étude: Aux États-Unis, le boom du pétrole et du gaz de schiste a dévasté les écosystèmes


Les forages effectués pour exploiter le pétrole et le gaz ont causé des dommages durables aux écosystèmes à travers le Canada et les États-Unis, c’est ce que documente une étude publiée le 23 avril 2015[1].

La dégradation des écosystèmes pourrait être irréversible

Publiée dans la revue « Science », l’étude examine l’impact de la production de pétrole et de gaz sur la croissance des plantes terrestres, en utilisant une mesure qu’on appelle la production primaire nette (PPN). La PPN peut être utilisée pour évaluer la santé de l’écosystème. Analysant des données satellitaires pour la période 2000-2012, les auteurs ont constaté que la production de pétrole et de gaz a induit une perte de PPN d’environ 4,5 Tg (ou mégatonnes) de carbone ou d’environ 10 mégatonnes de biomasse par la perte de la végétation qu’elle a engendré. Les terres cultivées ont perdu l’équivalent de 3,27 millions de tonnes de blé au cours de cette période – soit environ 13% de l’ensemble des exportations de blé des États-Unis en 2013 – tandis qu’on enregistrait une perte de végétation représentant plus de la moitié des terres de pâturage publics gérées par le Bureau of Land Management[2].
L’équivalent de la surface de la Région Languedoc-Roussillon occupée par les infrastructures liées à l’exploitation des hydrocarbures.
La production de pétrole et de gaz américaine a explosé au cours des dernières années, et ce « boom » a encore de beaux jours devant lui. Aujourd’hui, l’étude constate qu’entre 2000 et 2012, les plateformes de forage, les routes et les installations de stockages construites pour l’exploitation du pétrole et du gaz occupent environ 3 millions d’hectares de terres – l’équivalent de trois parcs nationaux de Yellowstone (ou 30 000 km2 soit plus de la superficie totale de la Région Languedoc Roussillon, ou 70% de la surface de la région Rhône-Alpes). Et selon les auteurs, comme la demande en agro-carburants et pour l’agriculture augmente, les activités pétrolières et gazières risquent de se propager encore plus loin dans les zones de pâturages inutilisées. Les dommages écologiques déjà engendrés par cette activité pourraient être irréversibles.



Impact de l’exploitation des pétroles et gaz de schiste sur le paysage

Steve Running, professeur d’écologie forestière à l’Université du Montana et coauteur de l’étude précise : «ce sont des terres semi-arides, il ne s’agit pas de régions luxuriantes. Donc cette terre pourra rester ainsi pendant des siècles sans qu’il n’y pousse plus rien s’il n’y a pas une certaine remise en état et une re-végétalisation ».

Par le passé d’autres études avaient analysé les impacts environnementaux des forages de pétrole et de gaz aux États-Unis, mais la plupart portaient sur des régions ou des aspects de la biodiversité spécifiques, tels que la perte de surfaces dédiées à l’habitat ou de ressources en eau[3]. L’étude publiée dans Science prend une approche plus large, plus complète, englobant plus de 2 millions de puits de pétrole et de gaz à travers les États-Unis et le Canada. Et bien que d’autres aient utilisé la PPN pour mesurer la santé des écosystèmes touchés par le l’exploitation des combustibles fossiles, les experts disent que cette étude est la première faite à une si grande échelle.

Un « appel à l’action » pour les décideurs

L’administration Obama a vanté le développement de l’exploitation du pétrole et gaz de schiste comme un « moteur de la croissance économique et une étape importante vers la réduction de la dépendance américaine au pétrole étranger ». Mais à présent il faut faire face à des préoccupations majeures sur l’impact environnemental de l’industrie des combustibles fossiles, et en particulier pour ce qui concerne la fracturation hydraulique, ou le fracking. Face à l’incertitude généralisée sur les effets à long terme en matière de santé publique, l’administration fédérale, vient d’introduire une réglementation plus stricte pour les entreprises de fracturation (lire notre article ici). Toutefois cette nouvelle réglementation concerne uniquement les terres fédérales. Or 90% des opérations d’exploitation d’hydrocarbure aux États-Unis ont lieu sur des terrains privés, communaux qui échappent à cette réglementation. Toutefois, les chercheurs espèrent que les conclusions de leur étude stimuleront des débats politiques plus larges concernant le compromis entre la préservation de l’environnement et la production d’énergie.

En Europe, le désastre lié à la recherche et l’exploitation des pétrole et gaz de schiste n’est pas encore là.  Préservons-nous en!

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[1] D’après “The oil and gas boom has devastated ecosystems across the US” publié le 23 Avril 2015 http://www.theverge.com/2015/4/23/8481845/oil-gas-fracking-ecosystem-damage-study
[2] Bureau of Land management : Le Bureau de Gestion du Territoire est une agence américaine qui fait partie du Département de l’Intérieur des États-Unis et qui gère les terrains publics. Ces terrains couvrent environ 1 070 000 km2. Ces terres sont situées en grande partie dans l’ouest du pays. L’agence emploie près de 9 000 personnes à plein temps et environ 1 000 à temps partiel ce qui représente 105 km2 par employé. Ses missions visent à préserver la santé, la richesse de la diversité et la productivité des terres qui sont exploitées en préservant celles-ci pour les générations futures.
[3] On notera que bien souvent les études ont été financées par l’industrie du pétrole et du gaz elle-même voir à ce sujet ce qui se dit de ce qu’on appelle frackademia http://public-accountability.org/2015/02/frackademia-in-depth/

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